Marseille, Quand ton Jardin était… Zoologique (1854-1987)
« J’ai toujours aimé raconter des histoires de bêtes et du plus loin que remontent mes souvenirs, les animaux ont fait partie intégrante de ma vie.
Quand j’étais « minot » comme on dit chez nous, le dimanche matin était réservé à la balade. Avec mon frère aîné, on nous mettait de beaux habits et on partait à la découverte de Marseille. Toutes les semaines, ma mère nous emmenait dans des endroits différents, et par les belles matinées ensoleillées, on contemplait le panorama imprenable qu’offre le Pharo, ou alors c’était la montée pénible pour nos petites jambes des rues pentues qui mènent à la Vierge de la Garde. Les promenades ne manquaient pas en ce temps-là. Il y avait la Plaine et ses petits chevaux à pédales, Saint-Barnabé où le printemps résonnait en mille couleurs et parfums, le Vieux Port et son inévitable traversée en ferry-boat, mais aucune ne me procurait autant de joie que la visite du Muséum d’Histoire Naturelle. C’était pour moi un enchantement. Il y avait dans cet endroit quelque chose de magique. On voyait des lions, figés dans des postures menaçantes, des poissons grands comme des torpilles et surtout l’éléphant majestueux de l’entrée qui nous faisait passer, mon frère et moi, pour des lilliputiens. Par les grandes fenêtres filtrait une lumière diffuse qui donnait à l’ensemble des collections des allures de surnaturel. Quand la visite (gratuite !) était terminée, il ne restait plus qu’à descendre les monumentaux escaliers du Palais Longchamp, le tout dans le jaillissement impétueux des cascades et des jets d’eau. C’était féerique.
L’autre balade qui me plaisait tout autant était d’aller voir les bêtes du Jardin Zoologique. Bien que les deux endroits se jouxtent, le zoo ressemblait à une jungle. Des beaux cygnes glissant sur l’eau des bassins, aux rugissements des fauves, on s’extasiait devant toute cette faune du bout du monde, exposée dans un décor de forêt vierge plus vraie que nature. Immanquablement on nous achetait des arachides que nous distribuions au peuple singe, pour le plaisir de voir les ouistitis décortiquer les cosses de leurs petits doigts agiles afin d’en sortir les cacahuètes. Je sais que les enfants d’aujourd’hui trouvent tout cela désuet, mais, que voulez-vous, à mon époque ceux qui possédaient une voiture n’étaient pas légion et ce n’est pas forcément la distance qui fait le dépaysement.
Je me suis donc appliqué à faire revivre ce passé révolu du Jardin Zoologique et du Muséum d’Histoire Naturelle, mais je conte aussi quelques anecdotes croustillantes sur les animaux qui ont séjourné dans notre Cité. Je ne suis pas écrivain, pas zoologiste et encore moins historien, mais marseillais je suis ! et marseillais resterai, et l’amour que je porte à ma ville a fait naître en moi toutes les audaces. Alors, plutôt que disserter avec une érudition qui pourrait être exaspérante, j’ai préféré un patchwork de textes et de documents, qui forment à eux seuls une évocation de ces animaux et font de ces histoires chères à mon cœur des récits qui, me semble-t-il, ne sont pas si bêtes. »
Introduction de l’auteur
136 p (2003), Nombreuses illustrations
Editions : Club Cartophile Marseillais, 20 Euros
ISBN : inconnu